D’où vient le mythe hexagonal du “régime à l’iode” pour soigner Hashimoto ?

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Episode 3 : iode, plage, crustacés…et thyroïde !

NB: vous découvrez ce feuilleton estival en cours de route…le début est ici!

Aujourd’hui, partons dans les Alpes…

En fait, il y a au moins 5 origines ou causes de ce mythe des « régimes à l’iode » pour soigner la thyroïde.

Aujourd’hui, restons en France pour comprendre ce qui se passe et à partir de demain, je vous enmène faire le tour du monde.

L’origine du mythe : problème français, solution suisse…

En 1860, Napoléon III, en quête de “succès”,  conquiert un territoire pas trop difficile à s’approprier : la Savoie. Il importe donc avec cette conquête des milliers de crétins, les “crétins des Alpes” qui peuplent ce nouveau bout de France. Il s’agit alors d’éradiquer le phénomène. Certaines vedettes de la littérature médicale s’y intéressent. A l’époque, il n’y avait pas de plateaux télé ni Youtube, mais il y avait déjà des moyens de s’épancher via nombreux canaux de communication pour distiller péremptoirement ses croyances “médicales”.

Bref, plusieurs hypothèses furent discutées, étudiées… des plus racistes, aux plus ésotériques en passant par les plus farfelues. Parmi elles,  l’hypothèse de la carence en iode fut aussi testée. Mais cette hypothèse fut remise en cause à l’époque car les médecins qui firent le test se trompèrent sur le dosage. Ils en mirent trop et la supplémentation en iode provoqua alors des maux de ventre aux patients.

Ce n’est qu’en 1922 que des médecins suisses introduisent une dose minimale d’iode dans le sel de table lors d’une expérience. Cette mesure est extrêmement efficace. En quelques mois, on constate un arrêt du développement du crétinisme. 

La carence en iode a longtemps été un problème de santé majeur dans le monde. Pas plus tard qu’en 1990, les habitants d’un petit pourcentage seulement de pays recevaient suffisamment d’iode, et 112 pays ont été classés par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme « gravement carencés en iode ».

Pour résoudre ce problème, les organisations mondiales de la santé se sont réunies et ont commencé à ajouter de l’iode au sel et à d’autres aliments enrichis, et le statut en iode des pays du monde a changé au cours des deux décennies suivantes. En 2014, le nombre de pays considérés comme gravement carencés en iode a chuté à zéro. Cela a été considéré comme une victoire évidente, mais nous savons maintenant que l’iode a une plage de sécurité plus étroite que tout autre nutriment. Cela signifie que beaucoup de personnes, en particulier les femmes, mangent trop d’iode.

Solution suisse…mais nouveau problème mondial !

Alors que les niveaux d’iode augmentaient dans les pays du monde entier, l’OMS a reconnu qu’un excès d’iode pouvait déclencher une maladie thyroïdienne. Mais malheureusement, l’OMS ne fournit de données synthétiques en population générale. Elle ne distingue pas les hommes des femmes alors qu’ils ont pourtant une réaction à l’iode bien différente !

Pour avoir des données concernant les femmes, il faut reprendre une à une les publications de base et sélectionner celles pour lesquelles hommes et femmes ont été distingués. Ces données élémentaires ne sont pas toujours disponibles pour toutes les ethnies et populations, mais il y a tout de même suffisamment de données sur les différents continents pour pouvoir en tracer des lignes générales.

De plus, pour des raisons pratiques, l’évaluation de l’OMS [1] n’est faite que  sur des enfants d’âge scolaire et extrapolée pour les adultes. Et la prise en compte des excès d’iode susceptibles de déclencher  l’auto-immunité n’est étudiée qu’au travers de la prévalence des  goitres d’origine auto-immune.  Or l’auto-immunité est un problème de santé des femmes qui peut leur causer de très nombreux troubles et symptômes, même en l’absence de goitre ! Ce pan entier de santé public n’est pas étudié et pris en compte dans les recommandations concernant l’apport en iode des populations.

Et on pourrait y redire aussi sur la manière dont les conclusions pour les femmes enceintes sont tirées… mais ça sera l’objet d’un prochain épisode de la série !

Si on reprend l’échelle de niveaux de  l’OMS et qu’on y remet les données des publications scientifiques récentes concernant les maladies de la thyroïde développées par les jeunes filles et les femmes, on obtient :

  • <20 mcg : goitre endémique (natif), hypothyroïdie congénitale, cancers de la thyroïde
  • 20-49 mcg : goitre pédiatrique, faible taux de maladie chez l’adulte
  • 50-99 mcg : taux de maladie le plus bas chez les femmes, zone d’inversion de la maladie thyroïdienne auto-immune
  • 100-199 mcg : faible taux de maladie thyroïdienne en général
  • 200-299 mcg : hyperthyroïdie induite par l’iode, maladie thyroïdienne auto-immune, goitre, hypothyroïdie
  • > 300 mcg : hypothyroïdie, goitre, maladie thyroïdienne auto-immune

Ce pic mondial de la consommation d’iode au cours des deux dernières décennies est exactement parallèle à l’augmentation fulgurante des maladies thyroïdiennes telles que l’hypothyroïdie, la maladie de Hashimoto et le cancer de la thyroïde. Bien que la corrélation n’égale pas la causalité, la recherche a soutenu la théorie selon laquelle un excès d’iode peut entraîner un dysfonctionnement de la thyroïde.

On sait d’ailleurs désormais exactement pourquoi. Des recherches très récentes ont percé le mystère. C’est ce dont je vais vous parler dans cette série estivale.

➽ Lire l’épisode suivant

Pour (re)lire les épisodes précédents :

Episode 1 : La controverse sur l’iode et la thyroïde

Episode 2 : Iode et thyroïde, des informations fiables ?


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